Poésie

Mère du vain caprice et du léger prestige,
La fantaisie ailée autour d'elle voltige,
Nymphe au corps ondoyant, né de lumière et d'air,
Qui, mieux que l'onde agile ou le rapide éclair,
Ou la glace inquiète au soleil présentée,
S'allume en un instant, purpurine, argentée,
Ou s'enflamme de rose, ou pétille d'azur.
Un vol la précipite, inégal et peu sûr.
La déesse jamais ne connut d'autre guide.
Les Rêves transparents, troupe vaine et fluide,
D'un vol étincelant caressent ses lambris.
Auprès d'elle à toute heure elle occupe les Ris.
L'un pétrit les baisers des bouches embaumées;
L'autre, le jeune éclat des lèvres enflammées;
L'autre, inutile et seul, au bout d'un chalumeau
En globe aérien souffle une goutte d'eau.
La reine, en cette cour qu'anime la folie,
Va, vient, chante, se tait, regarde, écoute, oublie,
Et, dans mille cristaux qui portent son palais,
Rit de voir mille fois étinceler ses traits.

André Chenier






Marie-Antoinette

D'Autriche venue une créature
Blonde et rose d'un charme si pur
A connu en France une destinée
Grandiose puis triste à en pleurer

Belle Archiduchesse amoureuse
De robes ô combien ravageuses
Faites de taffetas, mousseline, velours
Ah vous les adorez, troubadours

Comme moi vous succombez
A ce fleuri de couleurs pastels bordées
De rubans, de grisantes dentelles
Accentuées de parures qui nous ensorcelent

O fée devenue ensuite Reine
Après les merveilles voici la haine,
Haine des français de vous savoir
Si coquette devant votre miroir

Pourtant quel est donc cet odieux crime
Dont on vous accuse? Etre femme!
Aimer séduire, aimer plaire
Il n'y a rien là, mesdames, messieurs, de pervers

Certes Marie-Antoinette était dépensière
Elle vivait dans un monde de chimères
Mais fallait-il pour cela la condamner?
Elle vous aimait et vous l'avez décapitée!

D'Autriche venue cette créature
Blonde et rose d'un charme si pur
A été adulée puis sacrifiée
Sur l'autel de vos idées, quelle cruauté!

Danielle RAVIC 




Mon jardin si petit, si riant, si coquet
Propose gentiment son calme et sa fraîcheur
Groupant toutes ses fleurs, il forme un grand bouquet
Le chèvrefeuille ocré diffuse sa senteur.

Le rosier vermillon croule sous le portail
Offrant au vent léger son parfum épicé
Et s'ouvre pleinement en un large éventail
Sur le support ancien de bois entrelacé.

Le lierre allègrement monte le long du mur
Dans ses feuilles parfois se faufile un oiseau
Ce minuscule Eden couronné par l'azur
S'arrête court devant les perles d'un rideau.



Marie-Antoinette CORDINA-FONTANA


Je crois dans la beauté, dans l'innocence, qu'incarne la lumière pour en faire une femme. 
Celle qu'on appelle vierge, fille ou mère. 
Je crois dans nos sourires et nos larmes. 
Sans autres armes, nous décelons ces charmes. 
Ils briseront les pierres dures dans le coeur des rois. 
Ils feront revivre d'autres innocents dont nous sommes ascendants, et parfois même descendants, ces diamants qui reposaient modestes et dont la brillance , pour s'éloigner des vues mauvaises, s'en allèrent se cacher dans les flots des rivières, 
qui demeurent et deviennent quelques vierges, ou des filles ou des mères.